« On peut tromper tout le monde pendant un certain temps et certains pour toujours, mais on ne peut pas tromper tout le monde éternellement. » Abraham Lincoln
La Covid-19, le graphène, la protéine Spike et les effets secondaires
La guerre des Etats-Unis à la Russie sur le dos des Ukrainiens et des Européens
« Une erreur n’est pas une vérité parce qu’elle est partagée par beaucoup de gens. Tout comme une vérité n’est pas fausse parce qu’elle est émise par un seul individu. » Gandhi
Un journaliste remet en cause les conclusions de l'ONU sur l'absence d'effets néfastes sur la santé des habitants
Expiré
Jean-Michel Jacquemin-Raffestin enquête sur les catastrophes nucléaires depuis plusieurs années. Il est l’invité du 23h du jeudi 11 mars.
Auteur d'ouvrages sur la catastrophe de Tchernobyl (Ukraine), Jean-Michel Jacquemin-Raffestin signe une longue enquête en partie consacrée à celle de Fukushima, dont le Japon commémore les dix ans, jeudi 11 mars. Lui n'est pas d'accord avec l'étude publiée il y a quelques jours par l'ONU, dans laquelle ses chercheurs affirment que les émissions radioactives après l'accident à la centrale nucléaire n'ont pas eu d'effets négatifs sur la santé des Japonais.
"C'est scandaleux"
“C'est scandaleux !”, lâche celui qui se décrit comme un "passionné du mensonge d'État et des médias" plutôt que comme "un spécialiste". "Il y a quand même aujourd'hui 250 enfants qui ont des cancers de la thyroïde reconnus, seulement dans la préfecture de Fukushima", souligne Jean-Michel Jacquemin-Raffestin. Les études ne portent, en effet, que sur le secteur de cette dernière. Le Comité de l'ONU estime, lui, que la forte augmentation du nombre de cancers de la thyroïde chez les enfants exposés est imputable à une amélioration de la technique de dépistage ayant révélé "la prévalence d'anomalies qui n'avaient pas été détectées auparavant".
Fukushima mon Amour !
Expiré
Fukushima mon Amour !
Le séisme violent du 11 février 2021 dans le nord-est du Japon a ravivé le souvenir de la catastrophe de 2011.
Concernant la centrale nucléaire Fukushima Dai-Ichi, lourdement impactée en 2011, la NHK a relayé une information selon laquelle les sismomètres installés l’an dernier étaient en panne et qu’ils n’avaient pas enregistré cet épisode sismique.
TEPCo a reconnu que « des données précieuses n’avaient pas pu être enregistrées ». En substance et en nuance, la panne en raison des fortes pluies de juillet 2020 des deux sismomètres installés dans le bâtiment du réacteur de l'unité 3 avait été constatée mais aucune contre-mesure prise.
On peut penser qu'il n'y a pas à court terme de risques importants tant que le corium des réacteurs de Fukushima est refroidi. C'est le cas actuellement. En revanche, l'épisode des sismomètres montre que la culture de sûreté de TEPCo a encore des marges de progrès. Cela donne le sentiment que la compagnie essaye toujours de rogner sur les coûts.
La centrale a tenu cette fois-ci. Jusqu'à quelle magnitude de séisme peut-elle tenir ?
On peut craindre que personne ne le sache. Cette fragilité est certainement l’élément le plus inquiétant.
Bilan chiffré pour le 10ème anniversaire de la catastrophe de Fukushima
Publié le
https://fukushima.eu.org/bilan-chiffre-pour-le-10eme-anniversaire-de-la-catastrophe-de-fukushima/" data-a2a-title="Bilan chiffré pour le 10ème anniversaire de la catastrophe de Fukushima">Partager
A l’approche du dixième anniversaire de la catastrophe nucléaire à la centrale de Fukushima, voici un bilan chiffré effectué à partir des médias, des sites officiels et des 2 700 articles de ce site. Des mises à jour seront faites régulièrement.
Le dernier bilan du Ministère de l’industrie sur l’avancée des travaux à la centrale de Fukushima daï-ichi date du 24 décembre 2020 et a été mis en ligne en anglais le 28 janvier 2021 (lien direct).
Voir la centrale accidentée
Deux webcams fixes, installées en 2014, permettent devoir la centrale nucléaire en direct.
Il est possible de faire une visite virtuelle en anglais et japonais de la centrale nucléaire de Fukushima daï-ichi (lien direct). Mais les images et documents ne semblent avoir été mis à jour depuis février 2020. Certains bilans remontent à 2018.
La page en anglais concernant le retrait des combustibles des piscines ;
Réacteur n°4
La cuve était vide le 11 mars 2011 et il n’y a pas eu de fusion du cœur, mais une explosion hydrogène a détruit le bâtiment réacteur. L’hydrogène venait du réacteur n°3, voisin, via la cheminée de rejet commune.
La partie supérieure du bâtiment réacteur a été démantelée, les débris retirés et une nouvelle structure a été construire afin de retirer les combustibles de la piscine, qui est vide depuis décembre 2014. Depuis, les travaux sont arrêtés car le réacteur n’est plus menaçant.
Il y a eu une fusion du cœur et une explosion hydrogène a détruit le bâtiment réacteur. Tous les débris de la partie haute ont été retirés à l’aide d’engins télécommandés. Un nouveau bâtiment avec un toit, de forme cylindrique, a été construit. Le retrait des combustibles a débuté en avril 2019, avec 4 ans de retard par rapport au planning initial. Les opérations se sont révélées être plus compliquées que prévu, mais TEPCo devrait avoir terminé avant la fin mars 2021.
Il y avait 566 assemblages dans cette piscine (52 neufs, tous retirés et 514 usés). Certains ont été endommagés par la chute de débris. La page dédiée de TEPCo est ici en anglais. Une vidéo de présentation des opérations, ici en anglais.
Il y aurait, dans ce réacteur, entre 188 et 394 tonnes de corium (mélange fortement radioactif de combustible fondu et de débris), avec une valeur nominale à 364 tonnes. Ce dernier contient du combustible MOx, à base de plutonium. Pour en savoir plus. TEPCo a estimé que la récupération du corium de deux réacteurs 2 et 3 durera 12 ans et lui coûtera 1 370 milliards de yens (11,5 milliards d’euros). En 2017, TEPCo avait publié des photos prises à l’intérieur de l’enceinte de confinement de ce réacteur, sous la cuve, et une vidéo :
Depuis septembre 2020, l’Autorité de régulation nucléaire a repris ses investigations pour comprendre le déroulement du triple accident nucléaire à la centrale de Fukushima daï-ichi. Cela comprend des visites des réacteurs accidentés, malgré les forts niveaux ambiants de radiation. Elle en a rapporté des vidéos, dont celle-ci, prise le 18 septembre 2020, qui montre l’état de délabrement du bâtiment réacteur, presque 10 ans après l’accident :
Lors de ces visites, l’Autorité de régulation nucléaire, a découvert des débits de dose très élevés, de l’ordre de 10 Sv/h, au dessus de ces dalles de protection des réacteurs 2 et 3. Une dose létale en une heure sur place. Elle estime que la dalle du réacteur n°3 contient de l’ordre de 30 pétabecquerels (1015 Bq) de césium-137. Cela va compliquer les travaux de démantèlement.
Réacteur n°2
Il y a eu fusion du cœur, mais le bâtiment réacteur est entier. Le rayonnement ambiant est particulièrement élevé dans ce réacteur, rendant l’accès aux humains très difficile. Une délégation de l’Autorité de régulation nucléaire est allée visiter l’intérieur du bâtiment du réacteur, pour la première fois depuis l’accident, mais elle a dû faire demi-tour prématurément à cause des débit de dose qui atteignaient 11 à 12 mSv/h au cinquième niveau. Ce serait dû, notamment, à des poussières radioactives en suspension, ce qui est surprenant après tant d’années. Des débits de dose encore plus élevés, de l’ordre de 10 Sv/h, ont été mesurés au dessus des dalles de protection des réacteurs 2 et 3. L’Autorité de régulation estime que la dalle du réacteur n°2 contient de l’ordre de 20 à 40 pétabecquerels (1015 Bq) de césium-137.
TEPCo n’a pas commencé à retirer les combustibles usés de la piscine qui contient 615 assemblages. C’est désormais prévu aux alentours de 2024 et 2026 à cause des niveaux de dose ambiant dans le bâtiment réacteur. Des images ont été publiées en juin 2020 :
La compagnie a envoyé plusieurs robots dans l’enceinte de confinement afin de localiser le corium, ce mélange de combustible fondu et de débris. Il y en aurait entre 189 et 390 tonnes de corium dans ce réacteur, avec une valeur nominale à 237 tonnes. Pour en savoir plus. Plusieurs séries d’images ont été mises en ligne par la compagnie. On voit clairement le corium et un élément d’assemblage de combustible tombé au fond de l’enceinte de confinement :
TEPCo avait envoyé un robot au contact du corium en février 2019. Les images étaient impressionnantes :
Les autorités espéraient pouvoir débuter le retrait du corium avant le 10ème anniversaire. C’était l’objectif fixé en décembre 2011. Mais la technologie doit encore être développée et les ambitions avaient déjà été revues à la baisse en 2019 : il ne s’agissait plus que de récupérer quelques grammes de corium dans le réacteur n°2 en 2021. TEPCo a annoncé, en décembre 2020, le report d’au moins un an du début des opérations, officiellement, à cause de l’épidémie de COVID-19 au Royaume-Uni. Le bras articulé d’un robot, qui doit prélever le corium, est développé conjointement par Veolia Nuclear Solutions au Royaume-Uni et Mitsubishi Heavy Industries au Japon.
ll y a eu une fusion du cœur et une explosion hydrogène a détruit le bâtiment réacteur. Ce bâtiment avait été recouvert d’une nouvelle structure en 2011, qui a été entièrement démantelée en novembre 2016. TEPCo a commencé à retirer les débris de la partie haute du réacteur, pour, ensuite, reconstruire une nouvelle structure afin de vider la piscine de combustibles. Depuis, la compagnie est peu prolixe sur l’avancement des travaux.
En revanche, le retrait des combustibles usés de la piscine du réacteur n°1 a pris du retard : ce sera au mieux, 2027, voire 2028. La première date envisagée pour commencer ce retrait était 2018… Le coût de ces opérations n’a pas été estimé car la compagnie ne sait pas encore comment s’y prendre. En attendant, TEPCo a couvert cette piscine pour la protéger avec des sacs gonflables :
L’explosion hydrogène a fracturé la dalle en béton de 12 m de diamètre et de 60 cm d’épaisseur qui est particulièrement contaminée dans les réacteurs 2 et 3. Des débits de dose très élevés avaient été relevés en 2017, jusqu’à 2,2 Sv/h, c’est à dire une dose létale en quelques heures sur place (voir ces blogs en anglais et en français). Pour la dalle brisée du réacteur n°1, il n’y aurait “que” 0,16 pétabecquerels environ de césium-137.
Il y aurait entre 232 et 357 tonnes de corium dans ce réacteur, avec une valeur nominale à 279 tonnes. Pour en savoir plus.
Réacteurs 5 et 6
Les réacteurs 5 et 6 étaient arrêtés et partiellement déchargés le 11 mars 2011. Comme un générateur diesel de secours était encore fonctionnel, cela a permis d’éviter la fusion du cœur. Ces réacteurs sont maintenant entièrement déchargés et vont être démantelés.
Eau contaminée
En 2011, l’eau injectée pour refroidir les réacteurs a fini par déborder et provoquer la plus forte pollution radioactive marine de l’histoire. En avril 2011, c’était l’eau contaminée du réacteur n°2 se déversait dans la mer via une galerie souterraine. Et, en mai 2011, ce fut le tour du réacteur n°3.
TEPCo a estimé à 520 m3 d’eau très radioactive, soit 4 700 térabecquerels (1 terabecquerel représente un million de millions de becquerels) ou 20 000 fois l’autorisation de rejet annuel la fuite d’avril. Plus précisément, il y avait 2 800 terabecquerels d’iode-131, 940 térabecquerels de césium 134 et autant de césium 137. Ce seul rejet mériterait d’être classé au niveau 5 ou 6 de l’échelle internationale INES. L’IRSN avait estimé que c’était 20 fois plus.
L’année 2013 a été émaillée par une série de scandales suite à la découverte tardive d’une fuite d’une cuve d’eau contaminée et de rejets en mer (lire la synthèse publiée à l’époque). Les autorités ont réagi et le premier ministre de l’époque avait déclaré devant le comité international olympique que la situation est sous contrôle. En 2021, la situation n’est toujours pas sous contrôle et les JO pourraient être annulés à cause de la pandémie…
L’eau contaminée qui continue à s’accumuler est l’autre grand défi auquel doit faire face TEPCo.
Résumé de la situation
Le combustible qui a fondu et percé les cuves doit toujours être refroidi. A cette fin, TEPCo injecte environ 70 m3 d’eau par jour dans chacun des réacteurs 1, 2 et 3 (voir le bilan daté du 8 février 2021). Cette eau se contamine fortement au contact du combustible fondu et s’infiltre dans les sous-sols des bâtiments réacteur et turbine où elle se mélange à l’eau des nappes phréatiques qui s’y infiltre.
Après le fort séisme du 13 février 2021, TEPCo a remarqué que le niveau de l’eau dans les enceintes de confinement des réacteurs 1 et 3 avait baissé. Les fissures ont probablement été élargies et il se peut que la compagnie soit obligée d’augmenter le débit injecté. Pour le réacteur n°2, on ne sait pas car les capteurs ont été enlevés pour préparer le retrait du corium.
Au début de la catastrophe, les infiltrations souterraines s’élevaient à environ 400 m3 par jour et il fallait entreposer cette eau contaminée dans des cuves. Inversement, l’eau des sous-sols, fortement contaminée, fuyait vers la nappe phréatique, puis l’océan.
Pour réduire les infiltrations d’eau souterraine, TEPCo pompe dans la nappe phréatique en amont des réacteurs, avant que cette eau soit contaminée et la rejette directement dans l’océan. Elle a aussi construit une barrière tout le long du littoral et pompe aussi les nappes phréatiques au pied des réacteurs. Une partie de cette eau est partiellement décontaminée et rejetée dans l’océan. Une autre partie, trop contaminée, est mélangée à l’eau pompée dans les sous-sols des réacteurs pour être mise dans des cuves après traitement, en attendant une meilleure solution. Ce flux est de l’ordre de 5 m3/j selon le bilan daté du 8 février 2021 (entre 3 (source) et 8 m3/j (source) dans les bilans précédents disponibles ici).
La dernière barrière mise en place est le gel du sol tout autour des 4 réacteurs accidentés, sur 1,4 km dans le but de stopper les infiltrations. Après de nombreux déboires, le gel est terminé depuis novembre 2017. Elle a permis de réduire les infiltrations, mais pas de les stopper. La mise en place du mur gelé a coûté 34,5 milliards de yens (265 millions d’euros) aux contribuables auxquels il faut ajouter plus d’un milliard de yens (8 millions d’euros) par an pour l’électricité.
TEPCo pompe l’eau contenue dans les sous-sols des bâtiments réacteur et turbine des 4 réacteurs accidentés pour éviter les débordements. Comme cette eau est très contaminée, elle est traitée puis entreposée dans des cuves sur le site de la centrale. Une partie est réinjectée pour le refroidissement. Voici le circuit de l’eau à la centrale de Fukushima daï-ichi, tel que représenté par TEPCo :
Le dernier du 8 février 2021 fait état d’un surplus à stocker de 90 m3/j. C’est monté à plus de 350 m3/j à l’automne 2020 et même 600 m3/j lors du passage des typhons en octobre 2019. En 2019, le ministère de l’industrie faisait état d’un accroissement du stock d’eau de 50 000 à 60 000 m3 par an (source).
TEPCo a un portail dédié à l’eau contaminée où il apparaît qu’elle a accumulé 1,243 millions de mètres cube d’eau traitée. Il y a 1061 cuves sur le site de la centrale, dont 1018 contiennent de l’eau traitée par la station ALPS. Dans 29 autres cuves, il y a de l’eau où seuls le césium et le strontium ont été “filtrés”. Il y a aussi environ 4 800 m3 d’eau non traitée dans les sous-sols des réacteurs (au 8 février 2021).
TEPCo estime qu’elle n’aura plus de place sur le site de sa centrale pour mettre de nouvelles cuves à partir de 2022. L’option privilégiée est le rejet en mer.
Que faire de cette eau traitée ?
Après avoir envisagé plusieurs pistes peu réalistes, les autorités restreignent petit à petit les pistes au rejet dans l’océan de l’eau traitée, ce qui n’est pas une surprise. Avant tout traitement, ce bilan fait état d’une concentration de 65 MBq/L dans l’eau pompée. Avec sa station ALPS, TEPCo retire ensuite 62 radioéléments. Et, officiellement, il ne reste plus que du tritium (hydrogène radioactif) dans cette eau, car il est difficile de le retirer. Comme cet élément est rejeté par toutes les installations nucléaires, il devait plus y avoir de problème, si ce n’est que quelques rumeurs néfastes…
Mais, comme cela été découvert en septembre 2018, une large partie du stock (environ 72% actuellement) n’a pas été traitée convenablement, et les concentrations résiduelles pour certains éléments dépassent les concentrations maximales autorisées pour un rejet en mer. La charte ci-dessous, reprise du https://www4.tepco.co.jp/en/decommission/progress/watertreatment/index-e.html">portail de TEPCo montre que pour 6% du stock, la contamination résiduelle pour 7 radioéléments majeurs est 100 fois plus élevée que ce qui est autorisé pour les rejets. C’est entre 10 et 100 fois pour 15% du stock.
TEPCo s’est engagée à traiter une deuxième fois l’eau qui dépasse les autorisations de rejet et a commencé des tests en septembre 2020. Et ce n’est qu’à ce moment là que la compagnie a reconnu qu’il y avait d’autres radioéléments qui n’étaient pas retirés, comme le carbone-14. Cet élément n’était jamais mesuré ni évoqué dans les résultats publiés par la compagnie, comme nous l’évoquions dès https://fukushima.eu.org/point-sur-la-situation-de-leau-contaminee-a-fukushima/">septembre 2013, sans que cela ne perturbe l’autorité de régulation nucléaire japonais ou https://fukushima.eu.org/laiea-sur-leau-contaminee-que-du-blabla/">l’AIEA qui s’est prononcée sur la gestion de l’eau contaminée. Mais, le carbone-14 ne sera pas retiré pour autant…
Les tests effectués par TEPCo montrent que le procédé peut faire baisser la concentration résiduelle de l’eau contaminée sous les seuils de rejet, à l’exception du tritium. En fait, ce n’est pas vraiment une nouveauté, puisqu’une partie du stock avait déjà été correctement traitée. Les contaminations résiduelles élevées étaient dues à de mauvaises pratiques (économie sur des résines échangeuses d’ion, surveillance défaillante…). TEPCo ne présente aucune garantie sur l’amélioration de ses pratiques et le gouvernement japonais refuse toute mesure indépendante de l’eau qu’il souhaite rejeter dans l’océan.
La contamination en tritium, qui n’est pas retiré, est, en moyenne, de 730 000 Bq/L et dépasse donc la concentration maximale autorisée pour les rejets en mer, qui est de 60 000 Bq/L. TEPCo veut donc diluer cette eau avant rejet, à un quarantième de la limite, soit 1 500 Bq/L. De plus, l’inventaire du tritium dans les cuves s’élèverait à 860 TBq, ce qui est largement plus que la limite annuelle de rejet fixée à 22 TBq. TEPCo veut donc étaler ses rejets sur une trentaine d’années pour respecter cette limite.
A titre de comparaison, l’autorisation de rejet en mer de l’usine Areva de La Hague est, pour le seul tritium, de 18 500 TBq et les rejets effectifs de ces dernières années variaient entre 11 600 et 13 400 TBq par an. Le stock de tritium dans les cuves de Fukushima représente donc deux semaines et demi de rejets à La Hague. Le stock total, avec ce qui reste dans les combustibles, 2 mois… De quoi rendre jalouses les autorités japonaises, qui se font un malin plaisir de rappeler les rejets en tritium de nombreuses autres installations nucléaires de par le monde (page 13 de ce bilan du ministère de l’industrie) :
Cela n’a pas suffit à convaincre les habitants de Fukushima qui sont, dans leur majorité, opposés aux rejets dans l’océan. En juin 2020, 17 communes de Fukushima avaient aussi pris position contre, tout comme l’industrie de la pêche. Même Baskut Tuncak, rapporteur spécial de l’ONU depuis 2014 sur les implications pour les droits humains de la gestion et de l’élimination écologiquement correcte des substances et déchets dangereux, s’en est mêlé dans une tribune. Lors de la consultation publique, 4 011 avis ont été déposés et quasiment tous étaient opposés au rejet. Le gouvernement a donc décidé de reporter l’annonce de sa décision…
Le ministère de l’industrie japonais a ouvert, le 28 janvier 2021, une page spéciale dédiée à la gestion de l’eau traitée par la station ALPS, qui est moins bien détaillée que son dernier bilan daté de décembre 2020. On y trouve une photo de cette eau :
Les données officielles sont ici en anglais sur le site internet du ministère du travail. Le nettoyage du site ainsi que le bétonnage et l’asphaltage ont permis de réduire l’exposition des travailleurs. Les mesures de protection nécessaires en fonction du zonage sont ici.
• Du 11 mars 2011 au 31 mars 2016, 46 956 travailleurs ont été exposés aux rayonnements ionisants sur le site de la centrale accidentée de Fukushima daï-ichi, dont 42 244 sous-traitants. Ce sont les sous-traitants qui prennent les doses les plus élevées, avec une moyenne qui varie de 0,51 à 0,56 mSv par mois entre Janvier et Février 2016. C’est entre 0,18 et 0,22 pour les salariés de TEPCo.
• Le 1er avril 2016, TEPCo a remis tous les compteurs à zéro, ce qui est une pratique surprenante. La limite de dose sur 5 ans est individuelle, pas collective. Selon le dernier bilan publié le 29 janvier 2021, entre le 1er avril 2016 et le 31 décembre 2020, 24 502 travailleurs ont été exposés aux rayonnements ionisants à la centrale de Fukushima daï-ichi, dont 22 058 sous-traitants (90%). Ils sont un peu moins de 7 000 par mois. Ce sont toujours les sous-traitants qui prennent les doses les plus élevées. Elle est, en moyenne individuelle, deux fois plus élevée que celle prise par les salariés de TEPCo. D’un point de vue collectif, les sous-traitants ont reçu 95% de la dose collective sur cette période, qui est de 158 hommes.sieverts. On ne sait pas combien avaient déjà été exposés lors des cinq premières années ni la dose cumulée sur 10 ans. Le dernier bilan publié donne aussi les répartitions par classes d’âge, ainsi que des données mensuelles depuis le début de la catastrophe.
La dose moyenne annuelle reçue par les intervenants est passée de 12,50 mSv en 2011 à 2,54 mSv en 2019. L’année fiscale 2020 n’étant pas encore terminée, le chiffre donné (2,07 mSv) ne peut pas être comparé aux années précédentes.
Les données relatives au droit du travail et à la radioprotection sont ici en anglais.
Dans son dernier bilan daté de juin 2020, l’inspection du travail de Fukushima rapporte le nombre de violations du droit du travail découvertes à la centrale de Fukushima daï-ichi en 2019. Sur 325 employeurs inspectés, 188 ont commis des infractions (57,8%). 16 cas étaient relatifs à la santé des travailleurs (vérification des heures de travail, médecine du travail…). Il y a beaucoup plus d’employeurs (148) qui ne respectent pas toutes leurs obligations liées à la gestion des ressources humains (primes de risque, heures supplémentaires, information…).
Travailleurs étrangers
Le Japon est en pénurie de main d’œuvre dans plusieurs secteurs et a introduit un nouveau visa pour faire venir des personnes qualifiées dans un nombre limités de domaines. En avril 2019, TEPCo avait incité ses sous-traitants à bénéficier de cette opportunité. Mais, le ministère du travail, de la santé et des affaires sociales a appelé TEPCo à la prudence en lui rappelant que les travailleurs étrangers bénéficient du même niveau de protection que les travailleurs japonais face aux rayonnements ionisants et à ce qu’ils doivent connaître suffisamment bien la langue pour pouvoir comprendre les instructions. La compagnie a finalement renoncé (source).
Maladies professionnelles
Pour les maladies professionnelles, pas de changement depuis l’an dernier : deux cas de cancer de la thyroïde ont été reconnus comme étant d’origine professionnelle parmi les travailleurs à la centrale accidentée (premier cas et deuxième cas). Il y a aussi trois leucémies (premier, deuxième et troisième cas) et un décès. 16 travailleurs en tout auraient fait une demande de reconnaissance de maladie professionnelle et 5 dossiers auraient déjà été rejetés.
Cartographie de la pollution radioactive
• La dernière cartographie aérienne de la pollution radioactive autour de la centrale accidentée de Fukushima daï-ichi effectuée par les autorités date d’octobre 2020 et est disponible en ligne sur le site dédié.
• L’Autorité de régulation nucléaire publie aussi des données sur les débits de dose ambiants dans différentes communes et des doses intégrées depuis le début de l’accident. La limite d’évacuation a été fixée à 3,8 µSv/h au Japon, ce qui est très élevé (lire nos explications sur ces limites). C’est cette même limite qui est utilisée pour autoriser le retour. Les chantiers de décontamination ont été lancés dans les zones où le débit de dose dépassait 0,23 µSv/h.
• Cette carte donne les débits de dose mesurés dans tout le pays. Elle est mise à jour toutes les heures.
• Le “soil project” propose une carte basée sur des prélèvements de sols effectués par le réseau de stations de mesure et de laboratoires indépendants. Chikurin, le laboratoire monté au Japon avec le soutien financier et technique de l’ACRO est membre de ce réseau.
• Safecast : cette organisation utilise un radiamètre “maison” branché sur un smartphone pour mesurer le débit de dose ambiant. La carte regroupant les données est ici.
Décontamination et déchets radioactifs
Décontamination
Les travaux de décontamination sont terminés depuis mars 2018, sauf dans les zones dites de retour difficile. Pas grand chose de neuf, donc. Une carte en japonais du ministère de l’environnement permet d’accéder à quelques données sur les travaux effectués. A noter que seules les zones habitées, les zones agricoles et leurs environs immédiats ont été décontaminés. Pas la forêt, qui couvre 70% de Fukushima.
Pour les zones de retour difficile, ce sont de petits îlots qui sont décontaminés, essentiellement pour des raisons idéologiques. C’est aussi le cas à proximité des gares le long de la ligne Jôban. La ligne a été entièrement rouverte en mars 2020 après la réhabilitation de la portion de 20,8 km située entre Tomioka et Namié. Le gouvernement a levé l’ordre d’évacuer à proximité des gares d’Ôno, à Ôkuma et de Futaba. Les dates sont le 4 mars 2020 pour Futaba, le 5 mars 2020 pour Ôkuma et le 10 mars pour Tomioka. Le train a repris du service à partir du 14 mars 2020.
Dans les zones de retour difficile, la démolition de nombreux bâtiments abandonnés est en cours. C’est le cas notamment pour les bâtiments publics d’Ôkuma, Namié, Tomioka, Iitaté et Katsurao, dans les zones qualifiées de bases spécifiques de reconstruction et réhabilitation. Le but est de lever les ordres d’évacuation dans ses bases aux printemps 2022 et 2023.
Les immenses volumes de déchets engendrés par les travaux de décontamination continuent de poser des problèmes insolubles. Voir le cahier d’acteur sur le sujet, que nous avons écrit pour le débat national sur le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR) qui a eu lieu en 2019.
Dans son dernier bilan, daté d’août 2020, le ministère de l’environnement fait état de 14 millions de mètres cubes de sols contaminés accumulés. Ces déchets ont vocation à être entreposés pendant 30 ans sur un site de 16 km2 (1 600 ha) qui entoure la centrale de Fukushima daï-ichi, en zone de retour difficile (voir le site Internet officiel). Le gouvernement aurait acheté ou loué 92% des terrains. 8,33 millions de mètres cube de terre y auraient déjà été transportés, à la fin juin 2020. Le Japon espère avoir terminé en mars 2022.
Sur les anciens sites d’entreposage, dispersés un peu partout à Fukushima, le terrain est décontaminé et réhabilité, une fois les déchets partis.
Le transport se fait par camion de 10 tonnes essentiellement, qui protégés par une bâche avec une affiche verte à l’avant, comme sur cette photo prise par Chikurin, le laboratoire que l’ACRO a soutenu au Japon. En 2018, c’était environ 1 000 camions par jour ! Et entre 2 000 et 2 400 en 2019 !
Selon un sondage, 80% des habitants de la province de Fukushima ne croient pas à l’engagement du gouvernement de reprendre les déchets au bout de 30 ans.
De nombreux autres déchets, comme des boues de station d’épuration radioactives ou des cendres d’incinérateurs de déchets ménagers sont toujours en attente de solution dans de nombreuses provinces. A l’incinérateur d’Iwaki sud, les cendres sont simplement entreposées dans la cour :
Un suivi dosimétrique individuel a été introduit en novembre 2013 par la Radiation Effects Association, qui est l’organisme qui suit les travailleurs du nucléaire au Japon, pour les décontamineurs qui travaillent en zone évacuée et qui sont soumis aux mêmes limites de dose que les travailleurs du nucléaire (explications en anglais). Les données jusqu’en 2019 sont sur cette page en anglais.
Pour l’année 2019, ce tableau fait état de 30 807 décontamineurs qui ont pris une dose moyenne de 0,3 mSv. La dose maximale est de 9,3 mSv. La décontamination en 2019, a donc engendré une dose collective de 10 103,1 hommes.sieverts.
Pour la période 2017-2019, ce tableau donne 47 797 décontamineurs exposés à une dose moyenne de 0,5 mSv. 7 d’entre eux ont reçu une dose comprise entre 15 et 20 mSv. La dose moyenne en 2019 semble donc plus élevée. Ce doit être lié au fait qu’elle a lieu essentiellement dans les zones dites de retour difficile.
Il y a aussi des données qui vont de d’octobre 2019 à septembre 2020 où il y avait encore environ 20 000 décontamineurs exposés chaque trimestre. On n’a pas le nombre cumulé de travailleurs sur cette dernière année. Les doses moyennes sont de 0,1 mSv par trimestre et les doses maximales, de 2 mSv environ.
Zones évacuées et personnes déplacées
Le gouvernement avait introduit la limite d’évacuation la plus haute des recommandations internationales pour évacuer les populations : 20 mSv/an, même pour les bébés et les enfants qui sont plus sensibles aux radiations (voir nos explications sur les doses limites et normes). Il maintient cette même limite pour le retour alors que les recommandations internationales demandent une diminution progressive pour revenir à la limite normale qui est de 1 mSv/an.
Zonage
Les derniers ordres d’évacuer ont été levés au 1er avril 2017 à l’exception des zones dites de retour difficile où l’accès est interdit. Voici la dernière carte avec les zones où l’ordre d’évacuer a été levé et les “zones spéciales de reconstruction et de réhabilitation” indiquées par SZRR (source) :
Les SZRR consistent en quelques centaines d’hectares dans les communes les plus touchées pour maintenir l’illusion de la reconquête. Mais la décontamination y est beaucoup plus complexe.
En juin 2020, le gouvernement japonais envisageait de lever des interdictions d’accès dans la zone de retour difficile avant même d’avoir terminé les travaux de réhabilitation, à la condition que les habitants ne reviennent pas ! Et dans le district de Nagadoro de la commune d’Iitaté, les autorités veulent lever l’interdiction d’accès sans même décontaminer ! L’accès y sera contrôlé, un dosimètre sera exigé et les habitants ne pourront pas s’y réinstaller. Les autorités veulent y créer un “parc de réhabilitation” où des essais de “recyclage” des terres contaminées seront menés. Les 5 autres communes qui ont une partie de leur territoire classé en zone de retour difficile, ne veulent pas que ces nouvelles mesures soient appliquées sur leur territoire.
Voici les dates de levée des ordres d’évacuer :
Commune
Date de la levée de l’ordre d’évacuation
Tamura
1er avril 2014
Kawauchi
1er octobre 2014 pour une partie, puis 14 juin 2016
Naraha
5 septembre 2015
Katsurao
12 juin 2016
Minamisôma
12 juillet 2016
Iitate village
31 mars 2017
Kawamata village
31 mars 2017
Namie town
31 mars 2017
Tomioka town
1er avril 2017
personnes déplacées et Retour des populations
Le nombre de personnes déplacées n’est pas connu avec précision. Au tout début de la triple catastrophe, il y a eu jusqu’à 470 000 personnes dans des hébergements d’urgence. De nombreux autres s’étaient réfugiés dans des hôtels ou dans la famille et ne sont pas comptés. La seule catastrophe nucléaire a déplacé durablement 160 000 personnes environ. Le portail en anglais de la province de Fukushima annonçait encore 43 000 personnes déplacées en novembre 2018.
Les personnes déplacées qui se sont installées ailleurs et ne bénéficient plus d’aide financière ne sont plus comptées comme déplacées. C’est le cas, en particulier, des personnes originaires de zones où l’ordre d’évacuer a été levé et les “auto-évacuées”, qui sont partis même s’ils n’habitaient pas une zone d’évacuation. En effet, en août 2014, l’Agence de reconstruction, avait demandé aux administrations de toutes les provinces japonaises de ne compter que les personnes qui désiraient retourner chez elles. Et d’ajouter que s’il était difficile d’estimer leur désir, il ne fallait pas compter les personnes qui s’étaient réinstallées en achetant un logement ou en bénéficiant d’un logement du parc public. Chaque province applique à sa façon ces instructions et les critères ne sont pas homogènes. Ces chiffres, donnés à l’unité près, sont donc à prendre avec recul.
La triple catastrophe qui a frappé la province de Fukushima a accéléré le déclin accéléré de la population, comme on peut le voir sur le graphe ci-dessous (extrait de cette page en japonais). La dépopulation des zones rurales a commencé avant la catastrophe nucléaire. Cette dernière a fortement accéléré le processus.
Le taux de retour dans les zones où les ordres d’évacuer ont été levés reste faible et la population totale diminue. Le gouvernement va donc soutenir financièrement les nouveaux habitants qui viendraient s’installer dans 12 communes de Fukushima.
Voici les données par commune :
Namié : Une grande partie du territoire de la commune est classée en zone de retour difficile et l’ordre d’évacuer n’a été levé que dans une petite partie. Il y avait 21 434 résidents le 11 mars 2011 (source). Au 31 janvier 2021, 20 072 personnes originaires de Namié étaient encore déplacées, dont 14 021 dans la province de Fukushima et 6 051 en dehors (source, archives). A Namié, il y a 1 579 personnes qui y habitent, sur 16 681 habitants enregistrés, soit 9,5% (source). Voir aussi la fiche d’information en japonais ;
Iitaté : Le district de Nagadoro est classé en zone de retour difficile, mais très peu de personnes y vivaient. L’ordre d’évacuer a été levé dans le reste du village. Il y avait 6 509 résidents le 11 mars 2011 (source). Il y a maintenant 5 247 habitants enregistrés dans la commune. Au 31 janvier 2021, 1 482 personnes habitaient à Iitaté et 3 744 personnes originaires de étaient encore déplacées, dont 3 548 dans la province de Fukushima et 196 en dehors (source, archives) ;
District d’Odaka (小高) à Minami-Sôma : Le district d’Odaka a été évacué et l’ordre d’évacuation est levé. En mars 2011, il y avait 71 561 habitants à Minami-Sôma (source), dont 12 840 dans le district d’Odaka (source). Au 1er janvier 2021, il y a désormais 52 765 habitants enregistrés à Minami-Sôma (source). Dans le district d’Odaka, sur 7 003 résidents enregistrés, 4 725 y vivent vraiment (2 201 ont plus de 65 ans). Les 2 278 autres résident en dehors de la ville (source, archives). En ce qui concerne la partie évacuée du district de Haramachi (原町), il y avait 1 439 résidents en mars 2011. Et sur 683 résidents enregistrés, 592 y vivent vraiment (source).
Kawamata, district de Yamakiya (山木屋) : Ce district a été évacué et l’ordre d’évacuation a été levé. Il y avait 1 252 résidents dans ce district en mars 2011 (source). Au 1er février 2021, il y a 343 résidents sur 724 personnes enregistrées (source). Ce tableau fait état de 670 personnes encore déplacées, dont 117 dans la commune et 176 en dehors de Fukushima.
Naraha : Il y avait 8 011 résidents le 11 mars 2011 (source). Début 2021, il y a 6 761 personnes enregistrés dans la commune (source), dont 4 038 y vivent vraiment (source). La répartition par quartier et par classe d’âges est aussi disponible.
Tomioka : Il y avait 15 960 habitants en mars 2011 (source). Au 1er février 2021, il y a 12 319 personnes enregistrées (source), mais 1 576 y vivent (source). La répartition des personnes déplacées est aussi ici. La plupart sont à Iwaki et Kôriyama.
Katsurao : Une partie de la commune est encore classée en zone de retour difficile. Il y avait, dans la commune, 1 567 résidents le 11 mars 2011 (source). Au 1er février 2021, sur 1 376 personnes enregistrées, 925 sont toujours évacuées (source). La plupart sont à Miharu et Kôriyama.
Kawauchi : Il y avait 3 038 habitants le 11 mars 2011 (source). La page d’accueil de la commune ne donne que le nombre de personnes enregistrées : 2 566. Les seules statistiques démographiques ne sont pas à jour et ne permettent pas de connaître le nombre de résidents présents.
Futaba : La commune est presque entièrement classée en zone de retour difficile. Il y avait 7 140 habitants le 11 mars 2011 (source). Toute la population est encore évacuée. Cette page donne la destination de 6 803 personnes déplacées au 31 janvier 2021. Le nombre de personnes enregistrées dans la commune mois après mois est ici en japonais : elles sont 5 773 en janvier 2021.
Ôkuma : La commune est presque entièrement classée en zone de retour difficile. Il y avait 11 505 habitants le 11 mars 2011 (source). Au 31 janvier 2021, il y a 10 249 personnes enregistrées (source). Cette page donne aussi la destination des personnes déplacées et mentionne 283 habitants enregistrés vivant dans la commune. Il y aurait aussi environ 863 personnes vivant dans la commune sans y être enregistrées. Ce sont fort probablement des travailleurs en mission.
Hirono : La commune de Hirono est situées au-delà des 20 km et il n’y a pas eu d’ordre d’évacuer, mais juste une recommandation. Il y avait 5 490 habitants le 11 mars 2011 (source). La page d’accueil de la commune fait état de 4 699 personnes enregistrées dont 4 216 y vivent vraiment. Il y a aussi 2 447 qui y vivent sans y être enregistrées. Il s’agit de personnes déplacées d’autres communes et de travailleurs.
Tamura : seule une petite partie de la commune a été évacuée, dans le district de Miyakojimachi (都路町). En mars 2011, il y avait 41 662 habitants, dont 380 dans la partie évacuée du district de Miyakojimachi, et 4 117 dans la bande comprise entre 20 et 30 km où il a été recommandé de partir (source). Au 31 janvier 2021, il y a 254 habitants enregistrés dans la partie qui a été évacuée dont 213 qui y vivent vraiment (source). Pour la bande comprise entre 20 et 30 km, il y a 3 060 personnes enregistrées au 31 janvier 2021, dont 2 885 qui y vivent vraiment (source).
Impact sanitaire
• Décès directs : Le nombre total de décès directs dus à la triple catastrophe, s’élève à 15 899 (9 543 à Miyagi, 4 675 à Iwaté, 1 614 à Fukushima et 67 dans les autres provinces). C’est deux de plus que l’an dernier, car deux corps ont pu être identifiés. Il y a aussi 2 529 disparus.
• Décès post-accidentels : Les derniers chiffres officiels de la province de Fukushima (lien direct, copie), qui datent du 12 février 2021 font état de 1 606 décès directs dus à la triple catastrophe et de 1 disparu. Il y a aussi 2 317 décès indirects dus à des suicides ou à une dégradation des conditions de santé suite à l’évacuation.
Pour les trois provinces les plus affectées par le séisme et le tsunami, à savoir Iwaté, Miyagi et Fukushima, le nombre de décès indirects était de 3 739 au 30 septembre 2019. Un quart concernait des personnes avec handicap, selon l’agence de presse Kyodo qui a contacté 42 communes. La part des personnes handicapées est de 7% au Japon et celle des personnes de plus de 65 ans, de 14%. Ces statistiques pointent la nécessité d’améliorer la prise en charge des personnes handicapées en cas de catastrophe.
• Cancers de la thyroïde : L’université médicale de Fukushima effectue une campagne de dépistage par échographie des cancers de la thyroïde chez les jeunes de Fukushima. Ce suivi s’effectue tous les 2 ans jusqu’à l’âge de 18 ans. Puis, un nouveau contrôle est prévu à partir de 25 ans.
Les derniers résultats sont ici sur notre site : le dépistage officiel a découvert de 252 cas de cancers de la thyroïde suspectés chez les jeunes de Fukushima, dont 202 ont été confirmés lors d’une intervention chirurgicale. Il n’y a toujours qu’un seul cas qui s’est révélé être bénin après l’intervention (première campagne).
Le nombre de cas nouveaux, qui n’ont été détectés qu’à partir de la seconde campagne de dépistage (136), est plus élevé que le nombre de cas détectés lors de la première campagne (116), qui peut inclure des cancers qui existaient déjà avant la catastrophe nucléaire.
Le tableau ci-dessous synthétise issues du dépistage officiel. Le taux de dépistage diminuant au fur et à mesure des campagnes, le nombre de cas réels est donc plus élevé.
Dépistages avec résultat
Examens complémentaires terminés
Cytoponctions
Nombre de cancers suspectés
Nombre de cancers confirmés
Première campagne
300 472
2 091
547
116
101
Deuxième campagne
270 529
1 826
207
71
54
Troisième campagne
217 920
1 060
78
31
27
Quatrième campagne
177 424
758
64
27
16
Cinquième campagne
41
0
0
0
0
Plus de 25 ans
5 234
160
13
7
4
Bilan des campagnes de dépistage du cancer de la thyroïde chez les jeunes de Fukushima au 30 juin 2020 ( 31 mars 2020 pour les plus de 25 ans)
Les dernières données relatives à la quatrième campagne de dépistage, publiées le 15 janvier dernier, font officiellement apparaître qu’un enfant de moins de 1 an et qu’un autre de 2 ans au moment de la catastrophe nucléaire, sont atteints d’un cancer de la thyroïde. Voir la figure ci-dessous. Difficile de prétendre que le cancer existait avant la catastrophe pour ces deux enfants !
Distribution par âge au moment de la catastrophe nucléaire des 27 cas de cancers de la thyroïde découverts lors de la quatrième campagne de dépistage. Les cases blanches correspondent aux filles et les cases grises, aux garçons.
Il y a désormais 8 cas de cancer de la thyroïde chez des enfants de Fukushima qui avaient 5 ans ou moins au moment de la catastrophe nucléaire. Si l’âge ne constitue pas une preuve qu’ils sont dus aux radiations, cette hypothèse ne peut pas être exclue.
Il convient de noter que le premier cas découvert par le fond de soutien n’est pas dans les statistiques officielles, car il n’a pas été pris en charge via le suivi mis en place par les autorités. Les données officielles sont donc incomplètes.
Coût de la catastrophe
Coût total estimé
Les chiffres officiels relatifs au coût de la catastrophe ont été revus à la hausse en décembre 2016 pour atteindre 21 500 milliards de yens (175 milliards d’euros) et n’ont pas changé depuis. Cela inclut le démantèlement des réacteurs de Fukushima daï-ichi, à hauteur de 8 000 milliards de yens (65 milliards d’euros), 7 900 milliards de yens (64 milliards d’euros) pour les indemnisations, près de 4 000 milliards de yens (32,5 milliards d’euros) pour la décontamination et 1 600 milliards de yens (13 milliards d’euros) pour le centre d’entreposage temporaire des déchets radioactifs. Pour en savoir plus.
En 2019, Japan Center for Economic Research estime que la facture pourra dépasser les 80 000 milliards de yens (640 milliards d’euros au cours actuel). La note explicative est en japonais seulement. Sur le coût total de 81 000 milliards de yens (648 milliards d’euros), 51 000 milliards (408 milliards d’euros) sont dédiés au démantèlement de la centrale accidentée. A comparer au 8 000 milliards de yens estimés par le ministère de l’économie. L’indemnisation des victimes devrait coûter 10 000 milliards de yens (80 milliards d’euros) selon le think tank et la décontamination 20 000 milliards de yens (160 milliards d’euros).
Si l’eau contaminée était simplement rejetée en mer après dilution, la facture totale pourrait être réduite de 40 000 milliards de yens (320 milliards d’euros) selon le think tank, pour atteindre 41 000 milliards de yens (328 milliards d’euros). La facture totale pourrait encore être abaissée à 35 000 milliards de yens (280 milliards d’euros) si les réacteurs accidentés n’étaient pas démantelés, mais mis sous un sarcophage, comme à Tchernobyl. Mais cette solution reporte sur les générations futures les coûts du démantèlement et ne résout pas le problème des eaux souterraines qui s’infiltrent et se contaminent.
Le gouvernement détient toujours 50,1% des parts de TEPCo.
Indemnisations
En janvier dernier, les autorités avaient déjà prêté 9 716,5 milliards de yens (77,1 milliards d’euros), à TEPCo pour que la compagnie puisse indemniser les victimes de la catastrophe nucléaire et cela ne suffira pas. Les intérêts sont à la charge des contribuables.
L’indemnisation du stress psychologique s’est terminée un an après l’évacuation pour les personnes originaires d’un point chaud situé au-delà des zones d’évacuation. Les habitants originaires des zones dites de retour difficile ont reçu l’équivalent de douze années d’indemnisation et pour les autres, originaires des zones où l’ordre d’évacuer a été levé, l’indemnisation s’est arrêtée au bout de 7 ans. Un adulte a reçu 1,2 million de yens par an (environ 10 000 euros). Il y a eu aussi une compensation pour la perte des biens et des revenus, qui varie d’une famille à l’autre.
De nombreuses personnes ne sont pas satisfaites par les indemnisations reçues et réclament plus. En septembre 2011, les autorités japonaises ont mis en place une commission de conciliation chargée d’arbitrer les contentieux. Ses avis ne sont pas contraignants, mais TEPCo avait alors annoncé vouloir les respecter. Mais, dans les faits, TEPCo refuse de nombreux arbitrages et la commission a clôt de nombreux dossiers non réglés : 72 entre 2013 et 2017 (tous des employés de TEPCo et leur famille), 18 en 2018 et déjà un en 2019. Le groupe le plus important qui avait saisi, en vain, cette commission est constitué de 16 000 habitants de Namié, commune qui a été entièrement évacuée.
Plus de 10 000 Japonais ont porté plainte contre le gouvernement et parfois aussi contre l’Etat afin de bénéficier d’une meilleurs indemnisation. Il y a une trentaine de plaintes collectives. TEPCo a été condamnée de nombreuses fois à mieux indemniser les victimes et le gouvernement aussi. 14 jugements ont déjà été rendus par des tribunaux régionaux et 3 par une cour d’appel.
Parc nucléaire japonais
Avant la catastrophe de Fukushima, le Japon comptait 54 réacteurs de production d’électricité plus des réacteurs de recherche. Une carte datant de 2010 est disponible ici.
6 réacteurs ont été détruits ou endommagés par la catastrophe nucléaire à Fukushima daï-ichi et 16 ont été arrêtés définitivement depuis. Le Japon ne compte donc plus que 32 réacteurs nucléaires pour la production d’électricité : 16 ont leur dossier de sûreté validé et 9 ont été remis en service, dont 4 qui utilisent du combustible MOx. Mais, Ikata-3 a été suspendu par la justice en janvier 2020. Il n’y a donc plus que 8 réacteurs autorisés à fonctionner, dont 3 utilisent du MOx.
Aucune remise en service de réacteur n’a en lieu en 2019, ni en 2020. Le nucléaire japonais est bloqué. Par ailleurs, l’Autorité de régulation nucléaire a refusé de laisser un délai supplémentaire aux compagnies d’électricité pour la mise en place de mesure de protection contre les attaques terroristes. Quatre réacteurs ont dû être arrêtés en 2020, le temps de faire les travaux : Sendaï-1 et -2, puis Takahama-3 et -4. En novembre 2020, il n’y avait qu’une seule tranche en service… D’autres arrêts suivront en 2021 (voir la liste ici). A priori, 7 des 9 réacteurs remis en service devront être arrêtés pour les mêmes raisons.
Pour voir le détail du parc japonais, c’est par ici.
L’an dernier, les compagnies d’électricité japonaises avaient déjà dépensé 5 380 milliards de yens (45 milliards d’euros) pour améliorer la sûreté de leurs installations, avec un piètre résultat. De plus, selon l’agence Kyodo, un quart environ des employés des centrales nucléaires n’ont pas d’expérience d’exploitation suite aux arrêts prolongés. Cela atteint même 40% chez Tôhoku Electric, Chûbu Electric et Chûgoku Electric.
En décembre dernier, la justice a remis en cause l’évaluation du risque sismique validée par l’Autorité de régulation nucléaire. Lire notre article pour en savoir plus. C’est la première fois que la justice japonaise remet en cause l’instruction des dossiers de sûreté et l’application les règles de sûreté révisées en 2013, après la catastrophe de Fukushima. Cette décision pourrait faire jurisprudence.
Le gouvernement japonais voulait atteindre 20 à 22% de nucléaire dans le mix électrique à l’horizon 2030, mais il n’y arrivera pas. En novembre dernier, le ministre de l’industrie a reconnu qu’il ne sera pas possible d’engager la construction d’un nouveau réacteur nucléaire dans les 10 prochaines années, car l’opinion n’y est pas prête. Le gouvernement est en train de revoir la politique énergétique du pays, le plan actuel n’étant pas réaliste. En attendant, les communes sur lesquelles sont installées les centrales nucléaires reçoivent toujours plus d’argent…
• Le surgénérateur Monju a été arrêté définitivement. Il n’a fonctionné que 250 jours depuis sa mise en service en 1994. Une fuite de sodium avait entraîné son arrêt en 1995. La culture de sûreté y est défaillante (source).
• Les autorités n’ont pas encore abandonné l’usine de retraitement située à Rokkashô-mura dans la province d’Aomori dont la mise en service cumule déjà 25 années de retard depuis 1997, année de la première date de mise en service prévue (source). Le démarrage est désormais annoncé pour 2022 et le coût a été multiplié par 4.
Son dossier de sûreté est validé par l’Autorité de régulation nucléaire. Mais, même si cette usine démarre, elle devra tourner au ralenti car il n’y a pas de débouché pour le plutonium extrait. En effet, le gouvernement japonais s’est engagé à ne pas en extraire plus qu’il ne pouvait en consommer.
Les premiers déchargements de combutible MOx de l’histoire du Japon ont eu lieu en janvier 2020, dans les réacteurs d’Ikata-3 et Takahama-3.
• Faute de débouchés sur le marché intérieur, le Japon avait fait de l’exportation de sa technologie nucléaire une priorité pour sauver son industrie. Mais tous les projets de centrale nucléaire dans un pays étranger ont été abandonnés ou suspendus face aux coûts exorbitants.
Les conséquences médicales et écologiques de l’accident nucléaire de Fukushima, traduction en français des actes d’un colloque qui s’est tenu les 11 et 12 mars 2013 par Les éditions de Fukushima
Mon Troupeau Irradié : témoignages d’éleveurs de vaches de Fukushima, film disponible sur vimeo (code : 6353pi) à l’initiative de Nos voisins lointains.
Le 11/3, c’est ainsi que les Japonais appellent désormais la catastrophe de Fukushima, ce nom qu’il ne veulent plus entendre. C’est le 11 mars 2011 à 14 heures 46 minutes 23 secondes, heure locale, que le Japon a vécu son plus terrible tremblement de terre de magnitude 8,9 sur l’échelle de Richter.
Aujourd’hui, 11 mars 2018, partout dans le Japon les habitants vont se recueillir à 14h46 pour « Mokutô », cette prière silencieuse dédiée au repos des âmes des victimes de cette catastrophe.
Fuku (Bonheur- Fortune) Shima (île), Île du bonheur ?
A 250 kilomètres au nord de Tôkyô, c’est une région bien dangereuse. Au siècle dernier, il y a eu 8 tsunamis dans cette région avec à l’origine des vagues de moins de 10 mètres (quelques fois un peu plus), provenant de tremblement de terre de magnitude allant 7,7 à 8,4 environ tous les douze ans. Les plus récents, ceux de 1983 et 1993 avaient des vagues de 14,5 et 31 mètres à l’origine. En juin 1896 le tremblement de terre d’une magnitude de 8,3 provoqua un tsunami avec un retour de vague de 38 mètres dans la région du Tohoku, tuant plus de 27.000 habitants.
Les contres mesures prises lors de l’étude de FukushimaDaï-Ichï en 1960 considérèrent que le site était acceptable en fonction des connaissances scientifiques à l’époque.
Mais 41 ans plus tard…
Le Japon se situe à l’aplomb d’un point triple de convergence de plaques tectoniques. Au Sud, la plaque philippine plonge sous la plaque eurasienne, tandis qu’au centre (îles d’Honshu), la plaque pacifique plonge sous les plaques philippine et eurasienne. Cette convergence rapide génère une forte sismicité au large des côtes et à des profondeurs importantes1.
Contexte sismotectonique du Japon IRSN- FS6
Le 11 mars 2011, il est 14h46, quand un tremblement de terre de magnitude 8,9 dont l’épicentre se trouve à 180 km des villes de Sendaï dans la préfecture de Miyagi, à l’Est, frappe les centrales Daï-Ichï et Daï-Nï, à Fukushima appartenant à TokyoElectric Power Company’s (Tepco), entraînant immédiatement l’arrêt automatique des trois réacteurs en fonctionnement à Daï-Ichï, les n°1, n°2 et n°3, étant en pleine puissance, les réacteurs 4, 5 et 6 sont à l’arrêt pour maintenance. Il en est de même à la centrale FukushimaDaï-Nï distante de 11 kilomètres au Sud, pour les réacteurs n°1, n°2, n°3, et n°4.
A 14h49, le Japon ne sera plus jamais le même.
Le tremblement de terre entraîne immédiatement la perte d’alimentation électrique, externe au site, des réacteurs. Les groupes électrogènes de secoure à moteur diesel se mettent en fonctionnement. La fonction d’arrêt d’urgence, ou SCRAM, a été activée. Les réacteurs s’arrêtent automatiquement par insertion des grappes de commande dans le cœur, étouffant la réaction de fission par absorption de neutrons. Les secousses sismiques ont endommagé les équipements électriques entre les sous-stations du transformateur Shinfukushima de Tepco à la centrale de FukushimaDaï-Ichï. La ligne de secours de 66 kV qui fait partie du réseau de la Compagnie d’électricité Tohoku n’a pas pu alimenter le réacteur n°1 en raison de connexions blindées de modèles incompatibles.
Les réacteurs ont donc prouvé leur robustesse face au séisme. Tout était prévu, et l’on doit reconnaître la technicité japonaise quand on a vu des tours de quarante étages danser sans se désintégrer au sol lors d’un séisme de 8,9 sur l’échelle de Richter, tout, sauf l’imprévu ! C’est toujours comme ça ! Dans un accident nucléaire, il faut faire avec l’information acquise, mais dans l’imprévu ?
A l’origine, les plans de Daï-Ichï ont été conçus pour un tsunami de 3,1 mètres, basés sur le tsunami du Chili en 1960. Les réacteurs 5 et 6 ont été construits postérieurement aux quatre autres réacteurs. Le plancher a donc été construit à 10 mètres au-dessus de la mer, les pompes à eau, à 4 mètre au-dessus du niveau de la mer. Les plans de la centrale Daï-Inï ont été établis à 13 mètres au-dessus du niveau de la mer. En 2002, la base de conception a été mise à jour à 5,7 mètres au-dessus de la mer, et les pompes d'eau de mer ont été scellées, (Fukushima Accident World Nuclear Association).
Le pire n’est pas encore arrivé !
A son point d’origine, à 180 kilomètres de là, la vague atteint une hauteur estimée de 30 mètres par endroits. Arrivée sur les côtes de Fukushima, elle est d’environ 15 mètres de haut. Elle va tout ravager sur son passage, parfois, allant jusqu’à 10 kilomètres à l’intérieur des côtes, ravageant 600 kilomètres de côte.
A 15h27, soit 41 minutes après le tremblement de terre, le premier tsunami arrive, suivi d’une deuxième vague 8 minutes plus tard à 15h35. Celles-ci submergent et endommagent les pompes à eau de mer pour les circuits principaux de condensateur et les circuits de refroidissement auxiliaires, notamment le système de refroidissement résiduel du retrait de la chaleur (RHR). Elles inondent également les générateurs diesel, tous les mécanismes et les batteries électriques, tous situés dans les sous-sols des bâtiments de turbine, le système de câblage électrique et l’alimentation continue pour les réacteurs 1, 2 et 4. Un des quatre générateurs du réacteur n°6 initialement dédié à la climatisation est préservé, il va permettre d’assurer le refroidissement des piscines d’entreposage des combustibles des réacteurs 5 et 6 par la suite. Il n’y a donc plus d'électricité dans la centrale, et les réacteurs sont isolés. Les batteries des réacteurs 1 et 2 sont totalement inondées et hors d’usage, celle du réacteur 3 perd son alimentation en courant alternatif, il va tenir encore 30 heures jusqu’à l’aube du 13 mars. Le réacteur 5 perd toute son alimentation électrique en courant alternatif.
La vague détruit les prises d’eau en mer, conduisant à la perte de source froide indispensable pour évacuer la chaleur produite en permanence par les réacteurs.
▲ Coupe de la centrale montrant le niveau de l’inondation Rapport NAIIC-V3
Quand les diesels s’arrêtent à 15h42 environ, le refroidissement des cœurs est temporairement assuré par des systèmes de turbo-pompes alimentées par la vapeur produite dans les cœurs des réacteurs et faisant circuler l’eau contenue dans les tores annulaires situés en partie inférieure des bâtiments.
L’arrivée de source d’eau froide étant détruite, les moyens de refroidissement de secours se tarissent. A partir de ce moment, les cœurs des réacteurs 1, 2 et 3 ainsi que les assemblages de combustible usé, entreposé dans les piscines de ces réacteurs, ainsi que dans celle du réacteur 4 ne sont plus refroidis. Or, même à l’arrêt, le combustible d’un réacteur continue de dégager de la chaleur2, ou puissance résiduelle due aux effets des produits de fissions du combustible, qu’il faut évacuer, environ 1,5% de leur puissance thermique nominale, à partir du délabrement du produit de fission, environ 22 MW dans l’unité 1 et 33 dans les unités 2 et 3.
À 19H03, ce vendredi 11 mars 2011, l’urgence nucléaire est déclarée. À 20H50 la préfecture de Fukushima publie un ordre d’évacuation pour les personnes vivant à moins de 2 kilomètres de la centrale. À 21h23 le premier ministre, Naoto Kan la prolonge à 3 kilomètres, et à 5h44 du matin il prolongera la zone d’évacuation à 10 kilomètres pour les 45.000 personnes du secteur. Le samedi 12, cette zone d'évacuation sera prolongée à 20 kilomètres.
À 19H03, ce vendredi 11mars 2011, l’urgence nucléaire est déclarée. À 20H50 la préfecture de Fukushima publie un ordre d’évacuation pour les personnes vivant à moins de 2 kilomètres de la centrale. À 21h23 le premier ministre, Naoto Kan la prolonge à 3 kilomètres, et à 5h44 du matin il prolongea la zone d’évacuation à 10 kilomètres pour les 45.000 personnes du secteur. Le samedi 12, cette zone d'évacuation est prolongée à 20 kilomètres.
À partir d’une température du combustible à 800°C, l’eau commence à se décomposer au contact des gaines de combustible en zirconium en produisant de l’hydrogène et en dégageant de la chaleur… C’est l’enchaînement… La température atteint rapidement 1200°C ce qui accélèrent encore plus le processus. Sous une telle température, les gaines contenant les pastilles de combustible (MOX)3, éclatent puis fondent ainsi que les grappes de commande et produisent la liquéfaction du combustible au-delà de 2300 °C par dissolution de celui-ci au contact des métaux fondus. Ce phénomène produit de l’hydrogène en grande quantité et relâche des produits radioactifs dans les circuits.
Très vite le niveau de radioactivité monte dans la salle de contrôle du réacteur n°1, elle est 1000 fois supérieure à la normale. La perte d’électricité entraîne également la perte des équipements de surveillance tels que les jauges, les compteurs, et les fonctionnalités de contrôle-commande dans la salle de la centrale. L’eau de mer à inondé toute la zone, elle a atteint les équipements de haute pression des réacteurs 3 et 4 ainsi que la piscine commune de refroidissement.
Le premier problème se produit dans le réacteur n°1, on s’aperçoit 3 heures après l’arrêt d’urgence, (à 18 heures), que le niveau d’eau a chuté au-dessus du carburant. Une heure et demie après, à 19h30, le niveau d’eau a chuté au-dessous des barres, la température est à 2800°C. Les barres commencent à fondre… D’autre part, l’hydrogène se répand. Un mauvais fonctionnement va entraîner une accumulation d’hydrogène et une explosion dans le réacteur n°1 le samedi 12 mars. À 15h36, il y a une explosion d'hydrogène sur le plancher de service du bâtiment, au-dessus de la retenue de réacteur de l'unité 1, l'air comprimé pulvérise le toit et le revêtement sur la partie supérieure du bâtiment, après que l'hydrogène mélangé à l'air ait pris à feu.
Le cœur du réacteur n°1 commence à fusionner. On apprendra plus tard que le début de fonte du réacteur n°1, vers 5h30 du matin, a érodé le plancher en béton de 2,60 mètres d’épaisseur sur une hauteur de 65 cm…
Face à l’impossibilité de rétablir le système de refroidissement primaire défaillant, les responsables décident de puiser de l’eau de mer, ce qui inquiète la communauté scientifique internationale, « Utiliser de l’eau de mer pour refroidir le cœur du réacteur est un acte désespéré ».
A 22h15 un séisme d’une magnitude de 6 frappe à nouveau la préfecture de Fukushima.
C’est à 22h55 que l’opérateur Tepco informe qu’un deuxième réacteur, à Daï-Ichï cette fois, présente des symptômes similaires, de défaut de refroidissement, de montée de pression, forçant les autorités à ouvrir les valves pour évacuer la vapeur en excès. Une nouvelle explosion a lieu en direct à la télévision, dans le réacteur n°3 de Daï-Ichï, le 14 mars à 11h01, avec soi-disant la même origine que la première explosion. Elle s’est faite violemment et verticalement emportant toutes sortes de débris. Sa puissance est telle qu’elle soulève une dalle anti missiles située à la verticale de la cuve.
Puis le circuit de refroidissement du réacteur n°2 tombe en panne le lundi 14, il faut attendre environ 6 heures avant qu’une pompe à incendie vienne injecter de l’eau de mer à 19h54. Le niveau d’eau baisse dans le réacteur durant ce laps de temps, les tuyaux sont endommagés, une grande partie du carburant fond environ 100 heures après l’arrêt d’urgence. La pression est expulsée par les panneaux ouvert afin d’éviter une explosion d’hydrogène comme dans le réacteur n°1. La fusion partielle du réacteur commence vers 20 heures le 14 mars.
Toujours le mardi 15 mars, c’est le réacteur n°4 qui pose problème, une explosion d’hydrogène a lieu dans le bâtiment, ensuite un feu se déclare au 4ème étage dans le bassin, (piscine), du combustible usé et qui va libérer des substances radioactives dans l’atmosphère. Ce feu aurait été provoqué par l’hydrogène du réacteur n°3 qui serait refoulé par les conduits. Une partie des combustibles usés stockés est désormais à découvert. L’Agence de sûreté nucléaire japonaise annonce que le toit du réacteur n°4 est fissuré. Une grande partie du carburant dans les réacteurs n°2 et n°3 va fondre, mais dans une quantité moindre que dans le réacteur n°1 dans les jours qui suivent.
Le gouvernement mobilise plus de 80.000 soldats et policiers pour porter secours aux quelques 500.000 personnes déplacées, dont plus de 200.000 évacuées parce qu’elles habitaient dans un rayon de 20 kilomètres autour de la centrale Daï-Ichï.
La situation était tellement catastrophique que le gouvernement a demandé à l’empereur de parler au peuple. La précédente intervention impériale à la radio remontait à 1945 pour annoncer la reddition du pays.
Les problèmes ne sont jamais terminés
Qui nous informe aujourd’hui sur Fukushima et ses conséquences ? Que se passe-t-il là-bas ? C’est vrai, c’est très loin ? Ça ne nous touche pas. Nous ne risquons rien. Donc les médias français ne s’en occupent pas trop.
La mentalité japonaise fait qu’un tel accident était impossible, donc rien n’est prévu, les employés, les cadres ne prennent pas les bonnes décisions parce qu’ils ne sont pas informés de ce qu’ils doivent faire. La radioactivité va se répandre dans l’air, sur les sols, dans l’eau qui va se déverser dans l’océan Pacifique régulièrement. Comme l’explique Arnie Gundersen, un expert nucléaire du Vermont : « One step forward and four steps back as each unit challenged by new problem »4, la conclusion est simple et sans appel : « La contamination radioactive de l’atmosphère et de la nappe phréatique est quotidienne, continuelle et personne sur la planète n’a de stratégie, sur le plan technique, pour mettre fin à cette situation dans le futur ». C’est malheureusement encore vrai aujourd’hui, huit ans après la catastrophe. Il faut attendre la mi-mai pour que la société Tepco reconnaisse que les cuves des réacteurs n°2 et n°3 sont percées alors que les spécialistes étrangers l’avaient annoncé dès le 15 mars… Le Japan Business Press qui organise ses propres tests privés a déjà découvert des taux de radioactivité en plutonium dans des champs de riz à une cinquantaine de kilomètres de la centrale.
Ce sont des milliers de tonnes d’eau qui sont déversées chaque jour pour refroidir les réacteurs, actuellement 1.120.000 tonnes d’eau contaminées sont stockées dans des containers mais il n’y a plus de place pour les stocker. Aujourd’hui TEPCO ne sait pas encore ou se trouve exactement les cœurs des réacteurs fondus comme l’explique Hiroaki Koïde, professeur à l’Institut de recherche sur les réacteurs de l’Université de Kyoto. Il faut encore actuellement, 70 mètres cubes d’eau par jour pour le réacteur n°1 et 100 mètres cubes d’eau chaque jour pour chacun des réacteurs n°2 et n°3. L’AIEA s’est prononcée à l’automne dernier pour autoriser à déverser dans l’océan Pacifique cette eau contaminée.
TEPCO n’est ni capable de localiser exactement les coriums, ni de déterminer leur état réel. Personne ne peut s’approcher du site, les robots qui y ont été envoyés ne sont jamais revenus, totalement irradiés. En février dernier TEPCO a mis en ligne un film d’un robot qui gratte quelques grammes de corium.
Qu’est-ce que le corium ? Un magma de combustible nucléaire qui a fondu avec l’acier, le béton etc. La quantité de combustible était de 69 tonnes dans le réacteur n°1 et de 94 tonnes dans chacun des réacteurs n°2 et n°3, soit un total de 257 tonnes. La somme des quantités nominales de corium aujourd’hui est de 880 tonnes, soit 3,4 fois plus que le combustible qui était dans les réacteurs.
Le gouvernement japonais a signalé que la catastrophe de Fukushima a libéré en césium une quantité égale à 168 bombes atomiques d’Hiroshima libéré dans les airs sur les terres et versé en mer.
Le Japon et ses réacteurs
En 2011, le Japon avait 54 réacteurs nucléaires, dont 6 à Fukushima Daï-Ichï 5, lui permettant de produire 30 % de son électricité. En une année ils ont tous été fermés. Sortir du nucléaire pour un pays dont la consommation électrique en dépend à 30% n’est pas simple. Toutefois, les Japonais ont la discipline chevillée au corps, donc toute la population a participé à l’effort de réduction de consommation.
C’est le 5 mai 2012, vers 23 heures, que le dernier, le réacteur n°3 de la centrale de Tomari à Hokkaido dans le nord du pays est déconnecté du réseau. Le japon n’a plus aucun réacteur nucléaire en exploitation durant pratiquement deux ans. Aujourd’hui, le gouvernement pro nucléaire, de Shinzo Abe, a décidé de remettre certains réacteurs ayant obtenu l’aval de la Sûreté nucléaire en fonction. Certains ont de nouveau été arrêtés. Au 31 décembre dernier, plusieurs réacteurs étaient en fonctions, dans les centrales d’Ikata, le n°3, Takahama, les n°3 et n°4, Sendaï, les n°1 et n°2. Trois autres réacteur sont en construction dans les centrales de Oma, Totsu et Shimané.
Réutilisation des terres contaminées
Les terres ont été « nettoyées », une couche de terre de 20 cm, parfois 5 cm a été enlevée. Les déchets des terres contaminées sont stockés dans des sacs plastiques, il y a aujourd’hui 16 millions de sacs plastiques dans 1100 dépôts temporaires, 137.000 dans des dépôts sûrs. Dans les communes de d’Okuma et Futaba on construit deux sites de stockage intermédiaire pour recevoir 22 millions de sacs jusqu’en 2020. Pour éviter un trop grand nombre, les autorités japonaises ont décider de recycler et de réutiliser les terres contaminées à moins de 8000 Bq/kg, (le Becquerel est l’unité de mesure internationale utilisée pour la mesure radioactive des matières, aliments compris ? 1Bq = 1 désintégration/seconde).
Le gouvernement payait une allocation aux personnes déplacées pour se reloger ailleurs que dans les zones contaminées. Avec les J.O. qui arrivent, il préfère mettre l’argent dans la construction d’édifices pour les J.O., aussi, depuis le printemps 2017, les habitants des zones contaminées sont invités à revenir vivre chez eux.
La situation créée par la préparation des J.O. de Tôkyô est terrifiante. Elle est en train de faire oublier Fukushima, la banalisation de la radioactivité. Le public, comme le comité de J.O. ne sont pas informés de la réalité de la contamination.
Les effets sanitaires sur la population
On aurait pu penser que l’expérience de la catastrophe de Tchernobyl aurait servi à quelque chose ? Mais non ! Les autorités japonaises reproduisent 33 ans après les mêmes erreurs, les mêmes désinformations, les mêmes mensonges soutenus par l’AIEA et l’OMS. Que va faire le gouvernement ? Il relève les taux de limite de contamination de 20%… Alors que l’AIEA préconise que la population ne soit pas exposée à plus d’1 mSv/an au-dessus de la radioactivité naturelle, (Siéverts est la mesure de l’effet biologique des radiations sur un être vivant), le Gouvernement japonais augmenté ce seuil à 20 mSv. La nouvelle norme appliquée permet de manière efficace de continuer à faire vivre la population dans des zones où elle y aurait été prescrite en vertu de l’ancienne norme. Effectivement, si on abaissait le taux à 10 mSv, ce sont encore 80.000 personnes qu’il faudrait déplacer. On n’imagine même pas avec le taux à 1 mSv les millions de personnes à déplacer…
Le 7 octobre 2015, le professeur Toshihide Tsuda, chercheur à l’université d’Okayama a mis en ligne sur le site de la publication médicale Epidemiology les résultats d’une étude mettant en évidence « un excès de cancers de la thyroïde détectés par ultrasons chez les enfants et les adolescents du département de Fukushima dans les quatre ans qui ont suivi l’accident nucléaire ». Selon les statistiques publiées en août 2015, 137 cas suspects ou confirmés de cancers de la thyroïde ont été détectés sur les 370.000 enfants du département qui ont été examinés. Rappelons que l’incidence de ce cancer au Japon est de 1 à 2 cas pour 1 million d’enfants. Nous avons donc 20 à 50 fois plus que ce que nous attendions déclare M. Tsuda, pour lui « il semble difficile d’expliquer ces cas par l’augmentation des examens ».
Les derniers résultats, fin 2018, établis sur 816.496 personnes sont de 166 cas de cancers confirmés, mais de 207 cas suspectés. Ces données ne concernent que la préfecture de Fukushima, bien que les tombées radioactives aient dépassé les frontières de cette province, aucun dépistage n’est réalisé ailleurs.
Il faut attendre, de toute façon, nous ne saurons jamais le véritable bilan de cette catastrophe sur le plan sanitaire. Déjà les prévisions parlent de 417.000 cas de cancers supplémentaires d’ici 2061 dans la zone des 200 kilomètres autour de la centrale. Le Daily Yomiuri écrivait un an après le 11 mars 2011, que « 573 décès étaient liés à la catastrophe nucléaire ».
Fukushima pire que Tchernobyl
Les scientifiques américains, Janette Sherman6 et Joseph Mangano7 affirment dans la revue médicale Pr Newswire, que 14.000 décès aux USA sont liés à la catastrophe de Fukushima. Ils avaient déjà fait parler d’eux avec leurs études très détaillées, régions par régions sur les décès dus à Tchernobyl aux USA. Pour eux aussi, Fukushima c’est pire que Tchernobyl.
Les radionucléides, tel le Xenon133 des retombées de Fukushima ont été détectés aux Etats-Unis seulement quatre jours après le tremblement de terre. Les analyses effectuées par l’EPA, l’Agence pour la Protection de l’Environnement ont montré des centaines de dépassement des normes sanitaires dans les échantillons tels que l’air, l’eau, le lait etc… Cependant, dans sa sagesse, l’EPA a cessé de publier les résultats hebdomadaires, retournant à la publication trimestrielle.
Le centre de Contrôle des Maladies des Etats-Unis, (CDC), publie chaque semaine les décès, par âge, dans 122 villes ce qui représente environ 25 à 35% de la population totale. Durant les 14 semaines qui ont suivis les retombées radioactives de Fukushima, les décès ont augmenté de 4,46%, comparé à une augmentation de 2,34% pendant les 14 semaines précédentes. Le nombre de décès infantiles après Fukushima est passé à + 1,80 % alors que pour la période précédente il était de – 8,37%. La projection de ces chiffres sur l’ensemble de la population des Etats-Unis montre un montant total de 13.983 décès supplémentaires. Une analyse sur l’année 2011 entière montre 21.851 décès supplémentaires aux Etats-Unis.
Ça vous surprend ? Dès le 18 mars 2011, les plutoniums 238 et 239 sont apparus en Californie et à Hawaï ils étaient respectivement de 43 fois et 11 fois plus élevés que le niveau maximal enregistré durant les 20 dernières années. A San Francisco, c’est l’eau de boisson qui dès la fin mars contient 181 fois la dose admissible d’iode131 ainsi que du césium137. En avril, c’est l’eau de pluie analysée à Boise, dans l’Idaho qui contient 80 fois la dose admissible d’iode131 ainsi que du césium137. Le même mois, on a retrouvé du césium134, du strontium89 du strontium90, de l’américium et du curium dans de nombreuses régions des USA. Si on les cherchait en Europe, on les y trouverait également. Les vins de Californie, Cabernet Sauvignon 2012, ont été analysés par un français, ils contenaient du césium137.
Alors au Japon ?
Les responsabilités
L’énergie nucléaire est devenue une force échappant au contrôle de la société civile. Avec une arrogance renforcée par la mentalité collective de la bureaucratie japonaise, pour laquelle le tout premier devoir de tout bureaucrate est de défendre les intérêts de son organisation. Poussée à l’extrême, cette mentalité a conduit les bureaucrates à placer les intérêts de l’organisation avant leur devoir primordial, qui est de protéger la population.
Qui a très mal géré la catastrophe ? Tepco ou le Gouvernement japonais ? Les deux ! C’est ce que révèle le rapport de la Diète. Comme le reconnaitra un an plus tard, le 28 mai 2012, Naoto Kan, le premier ministre à l’époque du drame, la responsabilité première de la catastrophe nucléaire de Fukushima revient à l’Etat. Il a expliqué « L’accident étant intervenu dans une centrale résultant de la politique étatique, l’Etat est le premier responsable ».
Les plaignants ont eu beaucoup de mal à être entendu, le parquet de Tôkyô n’a pas donné suite à une plainte de plus de 7500 habitants de la préfecture de Fukushima et d’ailleurs au Japon déposée en 2012, qui voulaient poursuivre pour négligence, (c’est le moins que l’on puisse dire) devant la justice criminelle les dirigeants de Tepco ainsi que le gouvernement. Un rapport dévoilé vendredi 31 juillet 2015 nous informe qu’un comité judiciaire indépendant formé de 11 citoyens, a voté en faveur de la mise en accusation de Tsunehisa Katsumata, 75 ans, qui était président de la compagnie Tôkyô Electric Power (TEPCO) lors de l’accident ainsi que de ses vice-présidents Sakae Muto, 65 ans, et Ichiro Takeguro, 69 ans. C’est en décembre 2018, qu’il a, enfin, été requis 5 ans de prison contre ces trois personnes qui avaient plaidé non-coupables, après avoir nié leur responsabilité jusqu’au bout. Cinq ans est la peine maximale en cas de négligence ayant entraîné la mort.
Les mensonges du premier ministre Shinzö Abe
A l'été 2013, Shinzö Abe a affirmé au C.I.O. que le problème des eaux extrêmement radioactives était sous contrôle et qu'elles étaient totalement bloquées dans les 0.3 km² du domaine de la centrale nucléaire de Fukushima. Shinzö Abe : « Ma déclaration de « sous contrôle » n'était faite que pour rassurer le monde afin que le Japon accueille les jeux olympiques de 2020. » Le premier ministre japonais, M. Abe a affirmé qu'il ne voulait que « détendre l'atmosphère » en déclarant que « la situation des eaux extrêmement radioactives était sous contrôle ».
Néanmoins, le 3 mars 2014 à la Chambre des Conseillers, M. Abe a affirmé que l'atmosphère politique internationale était à dire que le Japon n'était pas capable de maîtriser le problème des eaux extrêmement radioactives et, donc, qu'on ne devrait pas l'autoriser à héberger les jeux olympiques de 2020. Shinzö Abe a ajouté qu'il était de sa responsabilité de faire disparaître cette atmosphère en disant que la situation était sous contrôle, ce qui ne signifie simplement qu'il est en charge de l'état des lieux sur la situation des eaux extrêmement radioactives ». Le jour suivant qu’il ait fait cette déclaration, le Japon gagnait le droit d’héberger les JO d’été de 2020.
N'oublions pas que les Jeux Olympiques ont toujours été utilisés comme outil de propagande pour promouvoir le nationalisme.
On prévoit un grand séisme
La légende veut que Namazu, le gros poisson sur lequel est posé le Japon, se réveille régulièrement. Un coup de queue à gauche, un coup de nageoire à droite, et c’est tout l’archipel qui vacille. C’est ainsi que les anciens Japonais expliquaient la fréquence des séismes, à une époque où la théorie sur la tectonique des plaques n’était pas encore née, où la sismologie n’existait pas. Le comité gouvernemental sur les tremblements de terre a publié le 26 juin 2018, une carte de probabilité de séismes. Ce grand séisme d’une force supérieure à 9 est prévu dans les 30 prochaines années. Ce jour-là c’est le Japon qui sera détruit à grande échelle. Est-il intelligent de vouloir continuer à construire des centrales nucléaires sur un tel terrain ?
Conclusion
Le prix Nobel de Littérature en 1994, Kenzaburo Oe, a exprimé ses craintes et ses doutes sur la politique nucléaire du Japon. Après Fukushima « J’avais eu cet espoir de voir les Japonais, le peuple tout entier, se détourner à jamais du nucléaire. L’espoir que notre pays saurait se libérer de cette dépendance. Mais, trois ans après, j’ai le sentiment que les Japonais commencent à oublier et sont sans doute prêts à repartir dans cette logique. Fukushima n’aura servi à rien. Il n’a pas changé le Japon. On voit bien que notre premier ministre Shinzö Abe n’a rien appris. Au contraire il essaie de convaincre l’opinion publique de l’impérative nécessité de faire redémarrer les réacteurs du pays. Pire, il essaye d’exporter le nucléaire japonais en mettant en avant notre grande expérience technique, infaillible. Il clame que le nucléaire japonais est le meilleur du monde ! »
Le gouvernement encourage activement l’oubli de la catastrophe de Fukushima avec l’aide des médias complices. Ils omettent de rendre compte de la contamination réelle, des risques de la situation réelle de Fukushima sans pour voir supprimer l’état d’urgence. La plupart des japonais ne savent pas que Fukushima est toujours sous état d’urgence nucléaire.
Kenzaburo Oe, le journaliste Satoshi Kamata, dénonciateur de scandales et l’écrivain à succès Haruki Murakami, regrettent que le Japon n’ait pas saisi l’occasion de réparer ce qui fut pour eux, « une regrettable erreur du passé » : construire des centrales nucléaires sur un sol si fortement sismique, qui plus est, dans un pays meurtri par la bombe atomique.
Comme l’explique Hiroaki Koïde : « Être l’hôte des Jeux Olympiques dans le pays en situation d’urgence nucléaire est absurde. Les états participants et quiconque parrainant un tel acte prennent le risque d’une part d’être exposé à la radioactivité, et d’autre part, d’être les complices de comportements criminels, et coupable du silence et de son déni ». Alors : « SHO GA NAÏ » (c’est la vie – fatalité contre laquelle on ne peut lutter, pas d’autre choix que d’accepter.)
Jean-Michel Jacquemin-Raffestin
A paraitre fin d’année
1 Les plus importants séismes : le 18 mai 1947, séisme de Zenkoji (34.000 morts, magnitude 7,4) – le 15 juin 1896 séisme de Sanriku (22 ?000 morts magnitude 7,6) – le 1er septembre 1923 séisme de Tokyo (plus de 100.000 morts magnitude 8,3) – le 16 janvier 1995, séisme de Kové (5.502morts magnitude 6,8).
2 Mi-mai 2011 le noyau de l'unité 1 produisait toujours 1,8 MW de la chaleur, et les unités 2 et 3 produisaient environ 3,0 MW chacun.
3 Ces « crayons » d’environ 1cm de diamètre rempli de son combustible produit une puissance d’environ 180 W par centimètre de longueur. Compte tenu du rendement élevé du processus de fission nucléaire, la chaleur est donc concentrée dans un très faible volume.
4 « Un pas en avant, quatre pas en arrière chaque fois que surgit un problème.
6 Diplômée de l'Université Western Michigan Janette Sherman se spécialise en biologie et chimie de la Wayne State University College of Medicine. Spécialisée en médecine interne et toxicologie avec accent sur les produits toxiques et les radiations nucléaires qui causent les cancers et les anomalies congénitales.
7 Joseph J. Mangano MPH MBA est le directeur exécutif de la radioprotection et de projets de santé publique, un groupe de recherche et d'éducation basé à New York.
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3 Commentaire(s)
GENEVIEVE WARETGROSJEAN
Mercredi 20 mars 2019 - 10:38
TOUS CONCERNES ...Quand va ton tirer les leçons du passé nul doute le livre sera intéressant à lire et de grandes qualités : merci M JACQUEMIN ET Mme LEPAGE
si robinson cru zoé
Mardi 12 mars 2019 - 09:23
Vraiment excellent cet article d'un... lecteur. C'est le premier "sinistre" japonais qui racontait à l'époque qu'il fallait "garder le sourire" pour ne pas être irradier, non? Ce qu'on appelle chez nous le rire jaune sûrement. Il y a quelques jours il y avait un doc sur la reddition du Japon en 45 et on y apprenait qu'aprés avoir raillé 2 villes de la surface de la Terre, le Général Mc Arthur c'était pointé avec les "pansements" pour "réparer" tout ça. 10.000.000 de Bibles. Gratos, c'est kdo. "Ils font des maisons en "papier", cela pouvait leur être trés utile, pourquoi es tu si "médisant"???"